Un lobby sioniste américain s’invite au Maroc et en Tunisie
Exclusif. Depuis un mois, la rumeur parcourt les réseaux sociaux: un éminent groupe de pression américain aurait débarqué au Maghreb afin de rencontrer des dirigeants locaux et renforcer leurs liens avec Israël. Panamza s'est procuré une vidéo attestant ces allégations.
Le 2 juillet, le site tunisien Nawaat publiait, sous la plume du militant Omar Alsoumi, un article évoquant les rumeurs autour de la récente visite d'un lobby sioniste dénommé "American Jewish Committee" (AJC). L'auteur du papier s'interrogeait sur la signification et la portée de cette venue dans la capitale tunisienne. Aucun responsable local n'avait alors souhaité confirmer avoir rencontré la délégation de l'AJC. Fin 2011, le parti Ennahda avait accepté de recevoir les membres communautaristes de ce lobby pro-israélien, également accueillis par l'ambassade américaine, tandis que le nouveau président de la République, Moncef Marzouki, avait décliné toute réception officielle. Par ailleurs, le 31 mai 2013, Rached Ghannouchi, leader et cofondateur de Ennahda, avait accepté l'invitation d'un think-tank américain dirigé par Martin Indyk, ex-membre de l'AIPAC et collaborateur du secrétaire d'Etat John Kerry. Dix-huit mois plus tôt, il "rencontrait discrètement" des officiels israéliens à Washington selon le correspondant à Jérusalem du magazine britannique The Economist.
L'AJC, groupe fondé en 1906, constitue l'aile centriste de la mouvance sioniste américaine et vient ainsi compléter les agissements de l'AIPAC, groupe ultra-droitier davantage focalisé sur le lobbying parlementaire en faveur d'Israël.
Le site de l'AJC avait déjà fait savoir, dans sa section agenda, qu'une "mission" était organisée au Maghreb entre le 21 et le 28 juin. L'homme à la tête de cette délégation se nomme Jason Isaacson: sous la présidence Ben Ali, il était déjà un habitué des rencontres officielles dont certaines étaient effectuées en tandem avec le CRIF. En 2009, il fut également décoré par le roi Mohammed VI du titre de "chevalier de l'Ordre du Trône".
Cet intérêt de l'AJC pour l'Afrique du nord remonte à loin : en 1955, ses membres, soucieux de sort de la communauté juive maghrébine, faisaient déjà pression sur la France et les dirigeants locaux pour co-financer un exil sécurisé de leurs coreligionnaires. De nos jours, l'AJC organise régulièrement des débats sur l'islam, notamment en compagnie de l'islamophobe Ayaan Hirsi Ali.
Voici la vidéo réalisée par l'AJC lors de son passage en Tunisie. Jason Isaacson précise être venu pour rencontrer des représentants juifs mais aussi des personnalités de la société civile, des cadres politiques, ainsi que des "officiels gouvernementaux".
Panamza reviendra prochainement en détail sur l'influence méconnue de l'AJC en France, notamment à travers l'exposition de sa relation particulière avec des figures hexagonales aussi diverses que Manuel Valls, Claude Goasguen, Malek Boutih, Jeannette Bougrab, Nacer Kettane (PDG de Beur Fm) ou l'entrepreneur Aziz Senni.
Manuel Valls entouré de Simone Rodan Bezaquen, directrice de AJC France, et David Harris, directeur éxécutif de AJC. New York, 29 juin 2013
Bonus : le discours de Nicolas Sarkozy, tenu en novembre 2007 au sein même des locaux new-yorkais de l'AJC, témoignait déjà de l'influence de ce lobby discret auprès des décideurs politiques, économiques et médiatiques.
Même déférence, quelques mois plus tard, par l'ancien Premier ministre François Fillon, en présence de Dominique Strauss-Kahn, alors directeur du FMI, et de Christine Lagarde, ex-ministre des Finances.
Hicham Hamza
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