Hyper Cacher : un témoignage censuré contredit la version officielle du « téléphone mal raccroché »
INFO PANAMZA. Découvrez en intégralité un témoignage troublant publié -puis censuré- par Le Point à propos de la prise d'otages de l'Hyper Cacher.
Le 04.11.2015 à 17h02
Le samedi 10 janvier, à 10h45, le compte Twitter de l'hebdomadaire Le Point relayait un article intitulé "EXCLUSIF. Hyper Cacher : le terrifiant témoignage de Mickael B".
EXCLUSIF. Hyper Cacher : le terrifiant témoignage de Mickael B. http://t.co/OvSsKCDAFa pic.twitter.com/8pq79SXGct
— Le Point (@LePoint) 10 Janvier 2015
Trois heures plus tard, l'article avait déjà disparu du site du Point selon plusieurs internautes ayant tenté d'ouvrir le lien url.
@LePoint La page que vous recherchez n'existe pas.
— Anja Willner (@WillnerAnja) 10 Janvier 2015
Dans la nuit suivante, Alexandre Picard, journaliste au Monde, a fait connaître le motif officiel de cette disparition.
@oliviertesquet @Alkanz retiré à la demande de la famille de l'otage interviewé, inquiète (dit la direction du Point)
— alexandre piquard (@apiquard) 10 Janvier 2015
"Inquiétude" de la famille qui aurait "demandé" son retrait ?
C'est curieux : l'article ne contenait ni élément biographique ni photographie permettant d'identifier "Mickael B".
Que pouvait-on y apprendre?
Journal aligné sur la ligne idéologique du Crif, Le Point a totalement fait disparaître le papier de son site mais il est possible de retrouver celui-ci sur différentes plate-formes du web (telles Book Actu et Tumblr).
Voici donc l'intégralité de ce témoignage recueilli par Saïd Mahrane, rédacteur en chef du Point, ami intime de l'islamophobe Christophe Deloire (ex-journaliste au Point) et auteur du premier tweet (à 10h36, soit 9 minutes avant le compte Twitter de l'hebdomadaire) relayant cet article finalement supprimé.
Mickael B. se trouvait dans l’Hyper Cacher au moment de la prise d’otages. Il fut, à l’intérieur du magasin, le principal interlocuteur d’Amedy Coulibaly. Témoignage.
« Il était un peu moins de treize heures. Ma femme m’a demandé d’acheter du poulet et du pain pour le shabbat. Je me suis donc rendu, accompagné de mon fils de trois ans, à l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes qui se trouve non loin de chez nous. Une fois à l’intérieur, au moment de me diriger vers la caisse avec mes articles à la main, j’ai entendu une détonation, très forte. J’ai cru d’abord à un pétard. Puis, en me retournant et en voyant un homme noir armé de deux kalachnikovs, j’ai compris ce qui se passait. De nouvelles détonations ont retenti. J’ai pris mon fils par le col et je l’ai entraîné au fond du magasin, où nous avons emprunté, comme d’autres clients, un escalier en colimaçon menant au sous-sol. En bas, nous avons pénétré à l’intérieur d’une des deux chambres froides. La nôtre ne fermait pas de l’intérieur. Nous étions terrorisés.
Cinq minutes plus tard, une employée du magasin, envoyée par le tireur, est descendue pour nous demander de monter, sinon le monsieur dit que ce sera une boucherie, nous dit-elle. Je refuse de monter. Mon fils est en panique, ne comprend rien. Nous attendons. Dix minutes plus tard, l’employée redescend avec le même message. Cette fois, je décide de la suivre. Nous reprenons l’escalier en colimaçon où se trouve, en haut, un homme mort dans son sang. Le terroriste se présente à nous. Il était étrangement calme. Je suis Amedy Coulibaly, malien et musulman. J’appartiens à l’État islamique, nous dit-il. Puis il nous a demandé de poser nos téléphones au sol. Il marchait dans le magasin, armé, tout en justifiant son acte, parlant de la Palestine, des prisons françaises, de ses frères en Syrie et de bien d’autres choses (nous refusons de relater ici la teneur de ses propos, NDLR).
Un des clients a soudain tenté de s’emparer d’une de ses armes, posée sur le comptoir du magasin. Elle ne fonctionnait pas. Le terroriste l’avait posée là, car elle s’était enrayée après la première fusillade. Il s’est alors retourné et a fait feu sur le client, qui est mort sur le coup. Il m’a ensuite demandé d’appeler pour lui des médias, ce que j’ai fait. Il a parlé à BFM TV. Le téléphone du magasin n’a ensuite pas cessé de sonner. Il s’agissait le plus souvent de journalistes. Je leur ai dit que ce n’était pas le moment. Mon fils s’est mis à pleurer. Il voulait rentrer à la maison. Il parlait du terroriste comme du méchant.
J’ai réussi à récupérer discrètement mon téléphone et à entrer en contact avec la police à l’extérieur, tandis que le terroriste, lui, déambulait entre les rayons. Un policier m’a dit qu’il nous faudrait nous mettre à plat au sol au moment de l’assaut, qui serait pour bientôt. Le terroriste, visiblement, se préparait à mourir. Il disait que c’était sa récompense. Il avait une arme dans chaque main, des chargeurs et des boîtes de cartouches à proximité. Il s’est soudain mis à prier. Mon portable était allumé, les policiers l’ont donc entendu. Quelques instants plus tard, le rideau du magasin s’est levé. Nous avons compris que c’était le début de l’assaut. Nous nous sommes jetés au sol. Le bruit était assourdissant. Il était mort. C’était fini. »
À la fin du papier, un passage est intrigant :
Il s’est soudain mis à prier. Mon portable était allumé, les policiers l’ont donc entendu. Quelques instants plus tard, le rideau du magasin s’est levé. Nous avons compris que c’était le début de l’assaut.
Mickael affirme que les policiers ont pu écouter Coulibaly grâce à son portable allumé et auraient alors, "quelques instants plus tard", déclenché l'assaut.
Double problème :
* sollicité le 11 janvier par Libération, un autre otage (surnommé Nessim Cohen) rapporte un dénouement différent :
Comme certains otages avaient leur téléphone, ils donnaient discrètement des informations à la police.
Coulibaly nous a dit qu’il allait faire sa prière. Cela a duré au moins quinze minutes, durant lesquelles on l’a perdu de vue. On a mis les autorités au courant. Mais nous n’étions pas certains du moment de l’assaut.
Par la suite, il est parti s’occuper de ses explosifs. C’est à ce moment que le RAID a fait exploser la vitrine. Coulibaly a crié. Il a couru vers la porte de secours, à l’arrière du magasin.
Mickael et Nessim se contredisent. L'assaut a été provoqué, soit "quelques instants après" le début de prière de Coulibaly (selon Mickael), soit "par la suite" de sa longue prière ayant duré "au moins quinze minutes" (selon Nessim).
* un téléphone "allumé" qui permet aux policiers d'intervenir pour surprendre Coulibaly durant sa prière? C'est l'affirmation également avancée par un "haut fonctionnaire" non identifié et interrogé par Le Parisien:
Un téléphone mal raccroché a permis de l'entendre faire ses prières. Il avait rejeté toute idée de dialogue. Il fallait intervenir.
C'est également l'assertion de BFM TV, antenne du tandem sioniste Alain Weill–Patrick Drahi.
À une différence près : selon la chaîne d'information, il s'agirait du téléphone de l'Hyper Cacher -et non celui d'un otage comme Mickael. Coulibaly l'aurait simplement "mal raccroché" si l'on en croit cette version officielle et rapidement relayée par l'ensemble des médias.
RTL, radio qui aurait tenté de joindre Coulibaly, a également prétendu avoir réussi à enregistrer ses propos à son insu grâce à ce téléphone "mal raccroché". Le "scoop" est présenté par Jean-Alphonse Richard, chef du service police-justice dont l'ancien patron (Hervé Beroud) est aujourd'hui directeur de l'information… à BFM TV.
Signalons au passage que Jacques Esnous, patron de l'info à RTL, est un journaliste de carrière qui se flatta –auprès de L'Express– de respecter scrupuleusement les "secrets d'État", notamment ceux qu'il a appris aux côtés de sa mère Denise Esnous (secrétaire particulière de Jacques Chirac, Georges Pompidou et Jacques Foccart).
De deux choses l'une :
-soit Mickael affabule quand il prétend avoir joué un rôle-clé en laissant son "portable allumé" afin que les policiers interviennent dès la "soudaine prière" de Coulibaly.
-soit les autorités ont inventé de toutes pièces cette histoire de "téléphone de l'Hyper Cacher mal raccroché" afin de dissimuler leur connexion avec l'un des otages au "portable allumé" (Coulibaly leur avait pourtant confisqué leurs smartphones).
HICHAM HAMZA
Bonus : pour en savoir plus sur l'affaire Charlie, consultez le dossier de Panamza.
En complément d'information sur l'Hyper Cacher, magasin vendu la veille de l'attentat, voici les singuliers témoignages -recueillis par la télévision israélienne- de deux otages.
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